De la Yeshiva à l'Université

Les coupes drastiques effectuées dans les budgets sociaux par l'ancien ministre des Finances, Binyamin Netanyahou, ont eu pour conséquence directe un afflux de Juifs orthodoxes dans le monde du travail et dans les programmes de formations professionnelles accélérées. Mais une deuxième conséquence, plus indirecte, commence aussi à apparaître avec l'apparition de plus en plus fréquente de Juifs orthodoxes dans les programmes universitaires. Certes, de nombreux orthodoxes pratiquent déjà des professions universitaires, mais ce sont généralement des Juifs venus de Diaspora, ou des personnes ayant étudié dans les universités et qui ont fait Téchouva ultérieurement.

Outre les nécessités économiques, cette évolution est également et paradoxalement due au prodigieux développement des Yeshivot durant les dix dernières années. Ce phénomène a abouti à la formation de très nombreux Rabbanim, enseignants ou juges rabbiniques, occupant tous les postes à pourvoir, et laissant par ce fait toute une population sans débouchés dans le domaine religieux, et obligés de trouver d'autres solutions.

L'image d'Epinal de "l'étudiant en Kollel" (Maison d'Etudes), va maintenant être "accompagnée" de celle de l'étudiant orthodoxe israélien assis sur les bancs des amphithéâtres universitaires. Cette évolution n'est pas seulement intéressante d'un point de vue "orthodoxe". Elle représentera aussi une nouveauté pour le monde laïc, qui a toujours considéré les "hommes en noir" comme une société monolithique, dans laquelle les comportements sociaux étaient conformistes par pression sociale.



Or, ce cliché est en train d'exploser car du Technion de Haïfa à l'Université Ben Gourion, et du Makh'on Lev à l'Université Hébraïque, de plus en plus de jeunes issus des milieux orthodoxes tentent un parcours universitaire, et souvent avec succès, car la formation talmudique dont ils ont bénéficié dans leur jeunesse, ainsi que leur habitude de consulter des livres, constituent des atouts intellectuels puissants.

Mais il faut tout de même noter que ce mouvement se fait sans accord explicite ou encouragement quelconque des autorités rabbiniques orthodoxes. En effet, le contact entre l'orthodoxie et l'université comporte de nombreux risques, si l'on se place du point de vue strictement religieux: contact avec des matières ou des théories ignorées ou rejetées jusqu'à présent par le monde orthodoxe, contact avec une population partageant des conceptions laïques voire anti-religieuses, mixité des cours, mœurs vestimentaires libres, accès à Internet etc. Tant de points qui risquent de détacher les étudiants de leur mode de vie d'origine. Mais qui vont certainement aussi démystifier et "humaniser" le monde orthodoxe aux yeux des non religieux gavés de clichés et de préjugés.



L'avenir dira quels auront été les effets de la rencontre entre ces deux mondes antithétiques.

Source : Arouts7

Photos : Univers Torah