Pourquoi Israël dérange les nations ?


Israël dérange parce qu’il met à nu les illusions historiques, morales et théologiques qui gouvernent le monde.
L’antisionisme radical qui prospère aujourd’hui ne peut pas être uniquement interprété à la lumière des sciences politiques ou de l’histoire contemporaine ; il trouve également un éclairage particulièrement pertinent à travers les sources de la Torah et les enseignements des grands penseurs juifs comme le Maharal de Prague, Rav Dessler et Rav Moché Shapira.

1. Le Maharal : Israël comme peuple au-delà de la nature

Dans plusieurs de ses œuvres, notamment dans le Nétivote 'Olam, le Maharal insiste sur la dimension méta-historique (métaphysique) d’Israël.
Le peuple d’Israël n’est pas simplement une nation parmi les autres. Il représente une anomalie ontologique dans le monde, car il est lié à une essence spirituelle supérieure (שייכות אל השורש העליון). Le Maharal enseigne que cela engendre une opposition naturelle et constante du monde envers Israël, non pas pour ce qu’Israël fait, mais pour ce qu’il est.

Le monde est structuré selon un ordre naturel (הנהגה טבעית), mais qu’Israël est régi par une conduite divine (הנהגה אלוקית). Cela crée une tension naturelle entre les nations (représentantes du monde matériel) et Israël (porteur du divin).

« Il y a une haine d’Israël qui n’est pas fondée sur la raison, mais sur l’ordre ontologique du monde. » (Netivote 'Olam, Maharal)

Autrement dit, cette haine ou ce rejet, qu’il s’agisse d’antisémitisme classique ou de son expression contemporaine à travers l’antisionisme, est enraciné dans une dynamique spirituelle plus profonde, indépendante des faits.

2. Rav Dessler : l’illusion morale et la projection psychologique

Dans le Mikhtav MeEliyahou (Tome I et III), Rav Dessler développe une idée essentielle : les choix moraux sont souvent pervertis par le "Nékoudat Habé'hira" (le point du choix), le seuil sur lequel nous faisons un choix qui déforme la réalité selon les intérêts émotionnels et idéologiques. L’homme construit des idéologies pour justifier ses instincts les plus profonds.

Ainsi, l’antisionisme contemporain, même habillé de rhétorique humaniste, n’est souvent qu’un masque pour cacher une pulsion de rejet. Ce que Rav Dessler appelle « la projection du mensonge comme vérité morale ».

Le Rav affirme que « Celui qui est dominé par son Yétser Hara (mauvais penchant), finira par réorganiser sa vision morale du monde pour justifier son comportement ou ses ressentiments. » (Mikhtav MeEliyahou, vol. I)

Ce phénomène est particulièrement visible dans certains cercles intellectuels occidentaux où l’antisionisme devient un nouveau dogme moral, une croyance contre laquelle aucun fait ne peut lutter. Le Rav Dessler l’interpréterait comme une déviation morale déguisée en vertu.

3. Rav Moché Shapira : Israël comme clef du sens de l’histoire

Rav Moché Shapira Za"l, dans l’un de ses nombreux cours magistraux, notamment sur la Galoute (exil) et la Guéoula (rédemption), souligne que le retour d’Israël sur sa terre et sa résurgence nationale ne sont pas seulement des événements politiques : ils sont la manifestation d’une tension en rapport avec la Révélation et la fin des temps.

Dans cette optique, ce que Rav Moché Shapira appelle « le dévoilement d’Israël comme porteur de la Parole Divine dans le concret du monde » entre en conflit avec les systèmes de valeurs des nations du monde.

Ainsi, l’antisionisme obsessionnel est l'expression d'une crise de sens face au retour d'une présence divine dans l'histoire. « Le retour d’Israël en terre d’Israël réactive le débat fondamental sur le sens de l’histoire. Ceux qui ne veulent pas de cette finalité résisteront avec une haine irrationnelle. » (Chiourim sur Yom Haatsmaoute et Galoute)

De même, Rav Its'hak Hutner dans son Pa'had Its'hak (Maamar sur Chavou'ote) décrit la haine des nations envers Israël comme le « refus du monde de coexister avec un absolu spirituel concurrent. Israël représente une Vérité qui ne peut être intégrée dans les systèmes profanes ». « Les nations ne pardonneront jamais à Israël d’avoir reçu la Torah au Sinaï. »

4. Une convergence dangereuse : Gauche occidentale et islam politique

La Torah nous enseigne que 'Essav (l’Occident chrétien) et Ichmaël (le monde arabo-musulman) ont des forces opposées mais peuvent s’allier pour tenter de neutraliser Ya'akov. Cette lecture est explicitement développée dans des midrashim (Béréchit Rabba) et reprise par les Mekoubalim.

J'aimerais faire remarquer que cette alliance étrange entre une gauche post-colonialiste qui culpabilise, antireligieuse, et un islam politique théocratique, ne peut se comprendre que par une lecture spirituelle. Il s’agit de deux forces antagonistes unies momentanément dans une négation commune d’Israël qui symbolise le projet divin dans le monde.

5. Conclusion : Une haine révélatrice

L’antisionisme radical n’est pas simplement une opposition politique à des décisions israéliennes. Il est devenu un refus du projet divin qui s’incarne historiquement dans le retour d’Israël sur sa terre et dans son existence en tant que peuple-témoin.

Les Sages enseignent que : « Ce peuple, je l’ai créé pour Moi, il racontera Ma louange » (Yeshayahou 43:21)
Rejeter Israël, dans ce qu’il incarne profondément, devient alors un rejet de ce témoignage même. C’est ce que le Rav Kook appelait « une révolte inconsciente contre la lumière du retour », une lumière qui dérange ceux qui veulent se tenir dans l’obscurité idéologique.

J'aimerais finir avec cette affirmation du Zohar qui ne laisse planait aucun doute sur la suite des évènements :
"L’exil d’Israël s’achèvera par une phase de haine extrême, car la Kedoucha (sainteté) est sur le point d’émerger. La dernière résistance avant la Guéoula est la plus violente". (Zohar Parachate Chémote)

Cette agitation finale, que l’on peut identifier à la haine contre Israël en tant qu’État (et non seulement peuple), est une révolte contre l’idée même de D-ieu dans l’histoire.

Rav Meïr Hazan