Comment préserver son identité juive quand on est otage du Hamas pendant deux ans

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Allumer une bougie de Hanouka au pied du Mur occidental après avoir survécu à plus de deux ans de captivité dans les tunnels du Hamas : pour Segev Kalfon, ce geste dépasse le symbole. Il incarne une victoire intime, celle de la survie morale et spirituelle face à un enfer conçu pour briser les corps et les âmes.

Dimanche soir, lors de la cérémonie d’allumage de la première bougie de Hanouka au Kotel, l’ancien otage de 27 ans est apparu entouré de sa famille. Originaire de Dimona et employé dans la boulangerie familiale d’Arad, Segev Kalfon avait été enlevé le 7 octobre 2023 alors qu’il tentait de fuir le festival de musique Nova, près du kibboutz Réïm.

Il a passé 738 jours en captivité à Gaza, dans des conditions extrêmes : faim, violences, isolement prolongé et détention dans les tunnels souterrains du Hamas. Il n’a été libéré que le 13 octobre 2025, dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu ayant permis le retour de vingt otages vivants. Jusqu’en février 2025, sa famille n’avait reçu qu’une unique preuve de vie.

Face au public rassemblé sur l’esplanade du Kotel, Segev Kalfon a évoqué ces prières qui, selon lui, l’ont accompagné jusque dans les profondeurs de Gaza.

« Même là-bas, depuis les ténèbres, je l’ai ressenti. Je savais qu’on ne m’avait pas oublié », a-t-il confié, avant de qualifier ce moment de « cadeau inestimable ». Pour lui, la première bougie de Hanouka symbolise « cette petite étincelle qui triomphe d’une grande obscurité », une lumière de foi et d’espoir capable de tout changer.

Cette lumière, il l’a dédiée à Ran Gouaili, otage dont le décès a été confirmé mais dont le corps est toujours retenu par le Hamas.

« Cette bougie brûle pour lui. Notre lumière est le fil qui le ramène à la maison », a-t-il déclaré.

Une bougie du souvenir a également été allumée en hommage aux victimes d’un attentat terroriste en Australie, en présence du Grand Rabbin d’Israël, le Richone Létsione Rav David Yossef, et du Rav du Kotel, Rav Chemouel Rabinowitz.

Mais c’est dans le récit de sa captivité que se révèle avec le plus de force la résilience silencieuse de Segev Kalfon. Dans un entretien accordé à la chaîne Mashav, il décrit les moyens par lesquels il a tenté de préserver sa dignité et son identité juive, malgré la violence et l’humiliation quotidiennes. Il évoque la nostalgie lancinante de la boulangerie familiale, l’odeur du pain chaud, l’angoisse pour ses parents restés seuls, à la fois endeuillés par son absence et accablés par le travail.


Hanouka occupait une place particulièrement douloureuse. À deux reprises, il a vécu cette fête en captivité, expliquant à ses geôliers qu’il s’agissait pour lui de la période la plus difficile de l’année. Les souvenirs des soufganiyot, de l’effervescence familiale et de la chaleur du foyer rendaient l’épreuve encore plus cruelle.

Dans cet univers destiné à effacer toute identité, Segev Kalfon a pourtant trouvé une forme de résistance intime. Sous prétexte de réparer un vêtement, il a réussi à obtenir une aiguille et du fil. Avec une djalabiya fournie par ses geôliers, il a cousu des kippote qu’il brodait du prénom de chaque otage.

" C’était à la fois une occupation et une manière de préserver notre identité », explique-t-il."

Ces kippote étaient portées furtivement, dissimulées dès qu’un terroriste approchait. Une fois, il a échappé de peu à la découverte en pleine prière, sauvé par l’avertissement d’un autre captif.

Les premiers mois de détention furent marqués par un silence absolu. Pendant quatre mois, les otages n’avaient pas le droit de parler entre eux, ignorant parfois même avec qui ils partageaient leur maigre ration de nourriture. Une simple tentative de murmure lui a valu des coups violents.

Aujourd’hui, debout devant le Mur occidental, Segev Kalfon incarne cette « petite lumière authentique » qu’il évoquait dans son discours. Une lumière fragile, mais tenace, qui a permis de préserver une identité, une foi et une humanité là où tout semblait voué à disparaître. À travers son parcours, c’est toute la signification de Hanouka qui prend chair : la capacité d’une étincelle à défier l’obscurité la plus épaisse.