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![]() Les préparatifs au mois de Tichri et de ses fêtes reposent en grande partie sur la Téchouva, le retour sur soi et le repentir des fautes, qu’elles concernent notre conduite face au Créateur du monde, ou qu’elles aient trait aux fautes que nous avons commises envers nos semblables. Lorsque c’est envers notre prochain que nous avons mal agi, il nous faut réparer nos fautes en demandant pardon à la personne lésée. Quand et comment doit-on s’acquitter d’une tâche aussi délicate ? Lorsque c’est envers notre prochain que nous avons mal agi, il nous faut réparer nos fautes en demandant pardon à la personne lésée. Quand et comment doit-on s’acquitter d’une tâche aussi délicate ? Nous sommes à l’entrée du mois de Élloul propice à la Téchouva. C’est donc le moment opportun pour étudier ces questions. ![]() La Guémara (id. 87a) rapporte une anecdote concernant Rav, qu’un boucher avait blessé (Rav est le nom de l’un des grands maîtres du temps de la Guémara). En veille de Yom Kippour, Rav se rendit chez le boucher, afin que ce dernier lui demande pardon quand il le verrait. Mais quand le boucher l’aperçut, il déclara ne rien avoir à lui dire. Quelques temps plus tard, le marteau qu’il utilisait lui tomba sur la tête et il mourut sur le champ. La Guémara rapporte une autre anecdote concernant Rav (id.), lequel se rendit douze fois auprès de rabbi ’Hanina pour lui demander pardon, que ce dernier lui refusa. Finalement il s’avéra que rabbi ’Hanina savait que Rav devait devenir Roch Yéchiva en Babylonie ; c’est la raison pour laquelle il repoussa les excuses de Rav, afin que ce dernier soit obligé de quitter Érèts Israël (de honte) et aille ainsi au devant de son destin. C’est à partir de ces deux histoires que sont tirées la plupart des règles halakhiques concernant la présentation d’excuses et la façon de les accepter. |
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L’une des premières
questions qui se posent est de savoir à quel moment il est opportun de demander pardon : est-ce souhaitable immédiatement après que l’impair ait été commis, ou bien y a-t-il lieu d’attendre la veille de Yom Kippour ?
Le Michna Béroura (606,1) rapporte le commentaire du Ba’h (id.) selon lequel il faut demander pardon immédiatement ; ce n’est que si la personne n’a pas la possibilité matérielle de faire cette démarche qu’elle peut se permettre de la repousser. Toutefois, la présentation des excuses ne pourra être repoussée au-delà de la veille de Yom Kippour, car il faut alors avoir « mis à jour les compteurs » envers autrui avant de pouvoir implorer le pardon divin. Cela va même plus loin : le Kaf Ha’hayim rapporte que lorsqu’une personne s’est rendu coupable de fautes envers l’Homme, et de fautes envers D‘, l’Eternel n’accorde pas son pardon tant que le pardon d’autrui n’est pas obtenu. ![]() La demande de pardon n’est pas exigée uniquement lorsqu’un dégât réel a été commis ou un vol effectué. On doit aussi demander pardon dans les cas de fautes sans préjudice matériel, comme par exemple une attaque verbale (cf. ’Hochèn Michpate. Chap. 228). Si la personne contre laquelle on a fauté déclare pardonner tout ce qu’on a fait contre lui – il n’y a pas besoin d’insister à lui fournir tous les détails des fautes commises, puisqu’en pardonnant globalement tout, même des fautes qui ne lui sont pas connues sont comprises (Az Nidbérou VII, 66). Quelle est la marche à suivre lorsqu’une personne ne sait pas que l’on a fauté envers elle, ou qu’elle l’apprend sans véritablement connaître les détails de l’affaire ? ![]() Rabbi Israël Salantèr (cf. Mo'adim Ouzémanim I, 54) évoque le cas d’une personne qui, en venant demander pardon à autrui et en lui rappelant ce qui a été fait à son encontre, lui cause alors de la honte ou du désagrément. Ici donc même en demandant pardon, on aura fauté. A plus forte raison n’y aura-t-il donc pas lieu de demander pardon sur des éléments qui n’ont aucunement dérangé la personne en leur temps, et dont elle n’a jamais eu vent, car alors le fait de les avouer lui occasionnera de la peine. Si, en revanche, la peine est déjà faite, mais qu’avouer le tour pendable qui aura été joué contre la personne augmentera son désagrément, il faudra demander pardon sans donner de détails quant aux mauvais actes commis contre elle. |
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![]() En revanche, si l’honneur de l’autre a été atteint, il faudra lui présenter ses excuses jusqu’à ce qu’il les accepte et pardonne, puis demander pardon à D. Tant qu’il est possible de rattraper les dégâts causés par ses propos, il faut parler à toutes les personnes qui les ont entendus et les corriger, afin que la personne calomniée n’ait pas à souffrir des conséquences de ce qui a été dit à son sujet. Le ‘Hafèts ’Haïm ajoute que même si notre victime n’est pas au fait de nos mauvaises paroles, il faudra lui en parler et demander pardon – sans doute s’agit-il d’un cas où la personne concernée n’éprouvera pas de honte à entendre ce qui a été dit contre elle (cf. plus haut). |
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![]() Si une première visite n’a pas réussi à emporter le pardon de la personne lésée, il faudra retourner auprès d’elle deux ou trois fois. D’après le Rambam, la première fois, on ira demander pardon tout seul, puis on ira encore trois fois, mais alors accompagné de trois autres personnes. Certains sont d’avis que l’on se fera accompagner de trois personnes dès la première fois (c’est ce qui ressort du Choul’hane ‘Aroukh), et on continuera de la sorte la seconde et la troisième fois. Si, malgré tout cela, la personne ne veut pas pardonner, on réunira alors dix personnes devant lesquelles on déclarera que l’autre a refusé d’accepter nos excuses malgré plusieurs demandes effectuées de notre côté. On sera alors quitte de nos obligations aux yeux de la Halakha (Rama 606,1). ![]() 'Hakham », et qu’alors une telle obstination risque d’entraîner une profanation de la Tora, elle ne pourra retourner auprès de la personne lui ayant refusé par trois fois son pardon. Une personne qui n’est pas d’un tel rang pourra elle insister, mais n’y est pas tenue (Ba’h, Michna Béroura chap. 4). En revanche, si c’est envers son propre Rav que l’on a fauté, il faut insister jusqu’à ce que le Rav accepte d’accorder son pardon, même après avoir essuyé trois refus. Le Michna Béroura précise que ceci concerne même un enseignant de Tora dont on a suivi les cours occasionnellement, même s’il n’est pas son Rav principal. De l’anecdote rapportée dans la Guémara entre Rav et le boucher, il ressort qu’il ne s’agit pas seulement d’accepter de pardonner à la personne qui nous a offensée ou lésée (ce que Rav aurait pu faire sans se déplacer), mais encore de tout faire pour que l’autre comprenne qu’il doit demander pardon. Rabbi Its’hak Blazèr (l’un des grands maîtres du « Moussar », de l’Ecole de morale) enseigne que l’on comprend de cela l’importance de demander pardon, c'est-à-dire savoir de s’abaisser devant l’autre. C’est cet aspect de la démarche qui permet d’absoudre la faute. En conséquence, il faut dans tous les cas présenter soi-même ses excuses. On ne pourra se suffire d’entendre que l’autre aura pardonné, car tant que l’on ne s’est pas "contraint" à demander pardon, notre faute n’aura pu être absoute. Une seule exception déroge à cette règle fondamentale : si la présence physique de la personne risque de mettre la victime encore plus mal à l’aise qu’elle ne l’est déjà du fait du préjudice qu’on lui a porté, on pourra se suffire de présenter ses excuses par personne interposée. ![]() Créateur : «Maître du monde, Tu as un peuple sur terre qui se conduit comme les anges du Service : de même qu’eux sont pieds nus, de même le peuple d’Israël est-il sans chaussures en ce jour (chaussures de cuir) ; de même que ceux-ci ne sautent pas en ce jour (ils ne font pas plusieurs choses à la fois), de même le peuple d’Israël est sur ses pieds ce jour-là (ils prient). De même que les anges du Service sont sans faute, de même en est-il du peuple juif ; de même que la paix règne entre les anges, de même les membres du peuple juif réussissent-ils à faire régner la paix entre eux. D. entend le témoignage positif des opposants, et leur pardonne leurs fautes ». On comprend donc ici l’importance d’être en bonne relation avec autrui à Yom Kippour, afin de pouvoir finalement obtenir le pardon divin. Nous avons écrit plus haut qu'il faut être indulgent envers celui qui a fauté contre nous, et accepter les excuses qu'il nous présente. Le Rama rapporte que si l'on a fauté envers nous en propageant une rumeur nous diffamant (Chèm ra’), on n'est pas tenu à l'indulgence ; en effet, il se peut que certaines personnes aient seulement entendu le mensonge initialement propagé, mais pas son rectificatif. Dans ce cas, le dommage qui nous a été causé reste d'actualité, et l'on n'est donc pas tenu de pardonner. Néanmoins, même si cela n'est pas obligatoire, il est recommandé de pardonner même dans de telles circonstances (Maguèn Avraham, Michna Béroura 606,11). Le Kaf Ha'haïm rapporte des décisionnaires pensant que dans ce type de cas la personne n'est réellement pardonnée que si l'offensé accepte sincèrement ses excuses (id. 33). Dans le cas où l'auteur de la diffamation proclame en public qu'il a menti au sujet de telle et telle personne, et qu'il demande pardon publiquement, l'offensé sera tenu de pardonner, puisque cet aveu sera alors connu de tous (`Aroukh Hachoul'hane 606,2). ![]() « Talmid `Hakham », il faudra payer à prix fort la honte causée, bien que l'offense n'ait été qu'orale... On impose dans un tel cas une amende fixe, tant en Érèts Israël qu'à l'étranger, et c'est ainsi que l'on faisait en Espagne... Même si l'offense faite oralement à une personne anodine ne donne pas lieu à amende, cela reste un grand péché, et la personne qui agit de la sorte, s'en prend aux gens avec violence et leur fait honte n'est qu'un fauteur et un imbécile (et un grossier personnage - ajout du Choul'hane 'Aroukh). Toute personne faisant rougir une personne juive respectable en public n'a pas part au monde futur ». Le Rama (`Hochèn Michpate chap. 420 par. 38) rapporte divers avis selon lesquels le Bèt Dine se doit de condamner à la bastonnade toute personne ayant fait honte à autrui en public, y compris dans le cas où cette honte est née suite à une rumeur diffamante colportée sur cette personne. ![]() Même si les informations calomnieuses étaient vraies, la chose reste interdite du moment que la volonté de la personne qui les a colportées était de faire honte à son prochain (Choute Chévoute Ya'akov 179) : publier la mauvaise conduite d'autrui n'est possible que si l'intention est d'empêcher l'autre de mal agir, d'alerter ses éventuelles victimes ou de porter témoignage suite à une convocation du Bèt Dine. Comment être pardonné si la personne envers laquelle on a mal agi n'est plus de ce monde ? ![]() La même procédure s'applique si l'on a fait courir une mauvaise rumeur sur une personne décédée depuis. Les grands Maîtres anciens ont interdit de faire courir des diffamations sur des personnes déjà décédées une personne qui aura transgressé cet interdit devra se repentir et demander pardon. Si on a insulté une personne post mortem, le Michna Béroura précise qu'il n'est pas besoin de se rendre sur sa tombe, et qu'il suffira de demander pardon là où l'insulte a été lancée (§ 14). En revanche, le Kaf Ha'haïm exige que l'on se rende sur la tombe de la personne pour demander pardon, même si on l'a offensée «seulement» en proférant des insultes (§35).Si l'on se trouve à plus de trois « Parsaote » (environ 12km à pieds) de l'endroit où la personne que l'on a offensée est enterrée, on n'est pas tenu de se présenter soi-même sur la tombe, mais on peut envoyer un émissaire qui s'y rendra avec dix autres personnes afin de demander pardon en notre nom. Le fait de demander pardon au fils de la personne offensée est inopérant, car le fils n'est pas en capacité de pardonner l'affront fait à ses ancêtres (Kaf Ha'haïm §41). Il faudra donc se rendre sur la tombe de la personne concernée, dans tous les cas cités plus haut. Si l'on doit de l'argent à une personne désormais décédée, on le rendra à ses héritiers. Si elle n'a pas d'ayant droits, on le donnera au Bèt Dine et on avouera sa faute devant lui (Rambam Hilkhote Téchouva chap. 2). ![]() De même, le mari pardonnera à son épouse. Un disciple dont le maître habite en ville devra se rendre auprès de lui en veille de Yom Kippour pour lui demander pardon. Dans de nombreuses communautés, il y a la coutume de réciter la prière "Zakha" après Kol Nidré, dans laquelle on pardonne à toute personne qui a fauté contre nous, sauf dans des cas de dommages financiers dont on pourra toujours exiger la restitution. Rav Michel Kottek |