Peut-on démolir ou vendre une synagogue?



Ruines d'une des synagogues à Névé Dékalim
De ce qui ressort de la Guémara (Méguila 26a et b), il n'est pas permis de détruire une synagogue tant que l'on n'a pas terminé de construire une nouvelle, de peur qu'un incident quelconque entrave la construction de la seconde, et que finalement le public se retrouve sans endroit où prier.

Cette conduite sera à suivre même si tout l'argent destiné à financer la construction du nouvel édifice est disponible, et même si la communauté dispose d'un local provisoire pour prier (Michna Béroura 152, 4 et 5).

Si toutefois on peut trouver dans la ville une autre synagogue capable d'accueillir tous les fidèles, il sera permis de détruire la première synagogue avant d'avoir construit la seconde (Biour Halakha 152).

Dans certains cas, on pourra agir autrement, en particulier si l'ancienne synagogue est dans un tel état qu'elle a besoin à tout prix d'être restaurée, s'il n'y a plus de Juifs dans le quartier en question, ou si le gouvernement ordonne la fermeture de l'établissement, comme cela pouvait être le cas en URSS. Il est alors possible de détruire la synagogue pour en reconstruire une ailleurs, si possible (Michna Béroura. 152,9).


Ruines de l'ancienne synagogue à Gamla dans le Golan
Mais toutes les synagogues n'ont pas le même statut juridique ! On distingue entre des synagogues desservant les villes, celles plus privatives construites par les habitants d'un village, et les synagogues totalement privées.

A l'époque du Talmud, les synagogues des villes étaient aussi construites par des donateurs de passage dans la ville, faisant partie des fidèles, mais n'habitant pas régulièrement sur place, tandis que celles des villages étaient érigées uniquement grâce aux deniers des autochtones. De nos jours, ce n'est plus exactement ainsi que les choses se passent : l'argent est en général remis entre les mains d'administrateurs, et c'est eux qui ont les pleins pouvoirs pour agir comme ils l'entendent.


Synagogue à vendre à Mulhouse
Quand la décision de vendre la synagogue doit être prise, ces administrateurs doivent se soumettre à certaines conditions avant d'arriver à cette extrémité (Biour Halkakha 153) :
1- Il faut que tous les administrateurs soient au courant de cette vente et qu'ils aient émis leur avis. En cas de divergence, c'est l'avis de la majorité qui sera suivi.
2- Tous les habitants de la localité auront été tenus au courant de ce projet, par affichage ou par la presse.
3- Il faut au moins un forum de sept personnes qui prennent cette décision quand il s'agit de la synagogue principale de la localité.
4- S'il s'agit d'une synagogue de quartier, il suffira de trois membres délégués par les fidèles.
5- Les administrateurs peuvent déléguer l'un d'entre eux pour gérer la vente.



L'ancienne synagogue de Méron en 1890
Evidemment, on ne pourra procéder à une telle vente sans raison valable, mais uniquement s'il n'y a plus Minyane, si la rénovation n'est pas concevable ou si on a déjà construit un édifice plus grand ou plus moderne.

Un oratoire privé dépend totalement de la volonté de son fondateur, qui peut agir à sa guise (Chévet haLévi 7,23). D'autres questions se posent, et seront soulevées dans un prochain article : que doit-on faire avec l'argent de la vente ? Peut-on céder le local pour n'importe quelle utilisation ou faut-il respecter encore la sainteté de l'endroit ? Ou, est-il possible de louer le site, afin d'utiliser l'argent de la location pour d'autres besoins ?

Rav Michel Kottek