Le récit très spécial d'un israélien en Afghanistan
Lundi 14 Décembre 2009 | 08h38

« J'ai dormi et mis mes Téfiline chez un Taliban ! »

Pour vouloir se promener en Afghanistan, il faut déjà avoir une certaine forme de témérité. À plus forte raison lorsque l'on est uniquement détenteur d'un passeport israélien. Mais cela n'a pas effrayé Ilan Morodov du mochav Kadima dont les parents sont nés là-bas!

Ilan Morodov est informaticien et il vit au mochav Kadima. Il y a quelques semaines, Ilan a décidé de réaliser l'un de ses vieux rêves : se rendre en Afghanistan, le pays natal de ses parents.

Pour ce faire, il s'est joint à un groupe de touristes israéliens qui avaient décidé de passer leurs vacances en Ouzbékistan. Le dernier jour du voyage, Ilan a expliqué à son guide qu'au lieu de rentrer avec tout le groupe en Israël, il souhaitait rester quelques jours de plus dans la région. Étant religieux, il a emporté dans ses bagages quelques boîtes de conserve et bien entendu ses Téfiline.

Il passe alors un Chabbate dans une famille juive de Tachkent, la capitale de l'Ouzbékistan. Le lendemain, il prend un autobus qui le conduit à Tarmaz, une ville située à une heure de Tachkent, à la frontière entre l'Ouzbékistan et l'Afghanistan. Ilan raconte: «À Tarmaz, j'ai trouvé un chauffeur qui a accepté de me prendre jusqu'au poste-frontière. Il faut comprendre qu'il n'y a pas le moindre touriste dans cette région ingrate. Le chauffeur me demanda si j'étais journaliste ...

Nous sommes arrivés au poste-frontière qui était particulièrement vétuste. Les soldats ouzbèkes m'ont regardé avec étonnement mais ils ont tamponné nonchalamment mon passeport israélien. La rencontre avec les soldats afghans, de l'autre côté de la frontière fut plus difficile: « J'ai à nouveau présenté mon passeport israélien.

L'un des soldats l'a ouvert et a compris qu'il s'agissait d'un passeport de l'État hébreu: "Vous ne pouvez pénétrer en Afghanistan avec un tel passeport" m'a-t-il dit. J'ai demandé à parler au chef du poste. Celui-ci est arrivé, en uniforme, le torse bardé de médailles et à ma grande surprise, il m'a adressé un sympathique "chalom" en hébreu ».
À partir de là, Ilan et l'officier vont dialoguer paisiblement:
- « Que venez-vous faire en Afghanistan ? Voulez-vous tuer des Talibans ?, demande l'officier à Ilan
- Certainement pas! Mes parents sont nés ici. Je suis venu sur leurs traces.
- D'où sont vos parents ?
- Ma mère est de Kaboul et mon père d'Ahrat.
- Vous savez qu'il n'y a plus de Juifs en Afghanistan.
- Je sais, répond Ilan.
- Parlez-vous afghan ?
- Pas le moins du monde, répond Ilan, ce qui fait rire l'officier.
- Tu es un homme sympathique mais je ne peux pas te laisser entrer avec un passeport israélien.

À ce moment-là, Ilan sort sa botte secrète. Une liasse de dollars qu'il a soigneusement conservée précisément à cet effet: «Je suis prêt à payer pour entrer. L'officier a alors changé de ton et a expliqué à Ilan qu'il pouvait lui fournir un laissez-passer provisoire lui permettant de se déplacer librement dans le pays. Moyennant 80 dollars soit une solde mensuelle de l'armée, l'officier laisse entrer Ilan Morodov en Afghanistan.

Ilan prend congé de son ami offIcier et monte dans un taxi qui va le conduire à Mazar el Charif. Le chauffeur, Ismaël, parle correctement l'anglais. De facto, il va devenir le guide d'Ilan au pays des Talibans. Alors que la nuit tombe, Ilan demande à Ismaël où il peut trouver un hôtel convenable. Ismaël lui propose de l'héberger, pour dix dollars la nuit, chez son beau-frère: «Je n'ai pas eu peur, raconte Ilan.

J'avais le sentiment qu'il n'avait pas d'animosité envers moi. Je suis arrivé chez le beau-frère d'Ismaël. Il y avait là six enfants qui dormaient dans leur chambre. Ismaël refusa de me parler de son beau-frère. Le lendemain matin, Ilan se leva et, comme il le fait chaque matin, il mit les Téfiline.

C'est à ce moment-là qu'un enfant entra dans sa chambre et peu à peu les six enfants se retrouvèrent en face d'Ilan qui terminait sa prière de Cha'harite : « J'avais des bonbons. Je les ai donnés aux enfants qui étaient tout heureux.

C'est alors qu'un vieil homme entra dans ma chambre. Il devait avoir 90 ans. Il posa alors sa main sur ma tête et murmura quelques mots avant de me serrer la main. J'ai raconté la scène à Is¬maël.

"Il t'a béni, Ilan. Depuis que les Juifs sont partis d'Afghanis¬tan, toutes les malédictions se sont abattues sur ce pays".

Ilan Morodov visita ce jour la capitale afghane Kaboul et tenta de se remémorer les histoires racontées par ses parents.

Arrivé à la frontière, Ilan demanda alors à Ismaël où était son beau-frère:
- « Il appartenait aux Talibans. Les Américains l'ont tué, répondit Ismaël.
- Ce qui signifie que j'ai dormi dans la maison d'un taliban ?
- Effectivement, et tu vois qu'ils t'ont bien reçu, déclara Ismaël. Ilan Modorov est rentré quelques jours plus tard en Israël. Il relata à ses parents son périple dans leur pays d'origine. Son seul regret: « De n'avoir pas pu photographier la tombe de mon grand-père à Ahrat. Mais Ilan promet de retourner sur place pour compléter son pèlerinage.

Source : Hamodia 02 décembre 2009